Panthéon: I, Zombie: The Chronicles of Pain (1998)

Hé! Si je vous disais qu’un des meilleurs films de mort-vivant est totalement inconnu au bataillon, y compris chez les bisseux? Et qu’il est l’argument parfait pour vous pousser à tenter le visionnage de films à priori fauchés et mal notés… qui se révèlent être de parfaites pépites?

Premier long métrage de l’anglais Andrew Parkinson, I, Zombie (connu également sous les titres francophones Moi, Zombie: Chroniques de la douleur ou Mémoires d’un zombie) est une variation très originale sur la figure du zombie sous la forme d’un drame psychologique, horrifique et introspectif. Le scénario (signé Parkinson également) est pourtant extrêmement simple: Mark, un jeune botaniste se fait mordre par un zombie lors d’une balade champestre. Nous allons alors le suivre dans son petit appartement, au quotidien, dans ses observations/pensées (en bon scientifique qu’il est), sa recherche de chair humaine, spectateur de sa lente dégradation physique/mentale… Car oui, malgré sa nouvelle « maladie », la conscience de notre héros, elle, ne pourrit pas. Huis clos physique, mental et matériel (l’appartement du protagoniste) donc, entrecoupé de souvenirs/rêves/hallucinations (quasi expérimentales par moments) et de changement de points de vue (apportant un peu de « légèreté » au récit et montrant quelques scènes d’extérieur), I, Zombie utilise également une voix off, une des grandes forces du film, évitant tout dialogue superflu ou subterfuge artificiel de mise en scène (plutôt ingénieuse ici). Filmé avec les moyens du bord (à savoir une caméra 16 mm) qui renforce son aspect réaliste et documentaire, ce journal de bord filmique touche à des thèmes durs mais profondement humains, bien loin de la simple exploitation horrifique, comme la solitude, l’isolement social et la détresse affective, la folie, la rupture amoureuse, le deuil, la maladie, la mort,… Le spectateur ne peut alors que s’identifier à Mark.

Si son concept minimaliste, son visuel « téléfilm », sa thématique glauque et son rythme lancinant ne plairont clairement pas à tout le monde (évitez de regarder ce film si vous avez une petite tendance dépressive, par exemple), on ne peut que déplorer la rareté de métrages horrifiques parvenant à autant de réalisme et d’intensité dramatique. Car oui, pour les plus aventureux d’entre vous, I, Zombie arrivera à faire émerger de purs moments de spleen (dans la tragédie sans retour possible qui touche Mark) que vous ne retrouverez pas ailleurs. Ici pas de scène d’action spectaculaire, de recherche de remède ou du patient zéro mais bien une agonie interminable sur tous les plans possibles. Le casting est composé de proches ou des connaissances du réalisateur (acteurs de théâtre amateurs pour la majorité). Saluons la performance solide de Giles Aspen (dont c’est hélas le seul et unique film) qui porte totalement le métrage sur ses épaules. Ellen Softley y incarne Sarah, la touchante fiancée de Mark et reviendra dans les autres films du réalisateur. La musique (Parkinson…again!) est simple mais diablement efficace (écoutez moi ça, bord*l!). Côté influences et références, on pensera tour à tour à la body horror de Cronenberg (La Mouche particulièrement), à Tetsuo, au Mort-Vivant, à Martin, à Angst… bref, à tous les films où la véritable monstruosité est le sort réservé au héros (sauf Angst tout de même). Son propos social le rapprochera évidemment d’un Romero. Malgré que le film soit auto-financé, les maquillages sont réussis (Paul Hyett à ses débuts) et là encore, le réalisateur réussit le tour de force de ne virer dans le véritable gore qu’à la toute fin du film. De la même façon, il évite à son drame de basculer dans l’excès de pathos, en supprimant la maximum de longueur ou répétition.

Tourné et monté sur deux ans (il faudra en tout et pour tout quatre ans au film pour sa conception) et passé totalement sous les radars à l’époque de sa sortie (malgré un prix remporté au Festival of Fantastic Films et sa distribution par le magazine Fangoria), cet OVNI audacieux et intelligent connaîtra tout de même une suite spirituelle en 2001, Dead Creatures, du même réalisateur. Son concept sera repris par plusieurs films plus tardifs: Colin, Zombie Honeymoon, Thanatomorphose, Contracted,… Un pur film d’auteur qui vous restera en tête longtemps après le visionnage. Avec plus de budget et une meilleure exposition, je n’ose imaginer l’impact qu’il aurait pu avoir sur le cinéma de genre…

Bonus: Interview du réalisateur en 1998

Note: Pépite

https://www.imdb.com/fr/title/tt0210740/

Bisseries: Dellamorte Dellamore (1994), Suspiria (2018)

Dellamorte Dellamore: Je profite des dernières publications consacrées à notre cycle « Zombie » pour revenir sur ce joyau encore trop méconnu qu’est ce film de Michele Soavi (assurément son meilleur)! Portée par un charismatique Rupert Everett (bien trop rare à l’écran), la sublime (et vénéneuse) Anna Falci et le regretté François Hadji-Lazaro, cette comédie noire sur un gardien de cimetière confronté à une épidémie de zombies au fond de l’Italie rurale alterne entre un cynisme de tous les instants et un surréalisme onirique que n’aurait pas renié Lucio Fulci ni même Jean-Pierre Jeunet! Oui, rien que ça! La photographie baroque et les effets spéciaux sont très réussis et certains plans méritent vraiment le détour! Adapté d’un roman et d’un fumetti de Tiziano Sclavi, le fatalisme dégagé par notre loser magnifique de héros et certains passages à mi chemin entre fantasmes et hallucinations fiévreuses permettent de hisser cette excellente série B parmi les (rares) films de mort-vivants dont vous vous souviendrez longtemps !

Note: Solide

https://www.imdb.com/fr/title/tt0109592/

Suspiria: Il y a des réalisateurs qui aiment bien les défis! En acceptant le remake d’un des chefs d’oeuvre de Dario Argento (une des plus grosses claques artistiques de votre serviteur, au passage), Luca Guadagnino se met sacrément en danger car en dehors d’une fin kistch à souhait, le Suspiria de 1977 n’a pratiquement aucune faiblesse!

Et pourtant, le métrage fonctionne plutôt bien sur ses trois quarts (oui, la fin bisseuse à souhait qui arrive sans prévenir dans ce film à l’esthétique léchée fait vraiment tâche, sans doute un hommage au film originel vraiment dispensable), d’abord grâce à son casting féminin (Swinton, Moretz et Goth en tête mais vu leurs CV respectifs, on commence à avoir l’habitude!), son scénario à plusieurs niveaux de lecture (mais si pas exempt de lourdeurs… bien au contraire!) et son va et vient habile entre drame, thriller et fantastique. Et surtout, surtout, ce Suspiria là n’essaye ni de singer les décors baroques et l’ambiance psychédélique de son aîné ni de ressuciter le giallo. On est ici à Berlin à la fin des années 1970 et la grisaille est partout (merci le Bahaus!), tout comme les fantômes de la Seconde Guerre Mondiale. Le rock progressif venimeux des Goblins a laissé place à la bande-son minimaliste de Thom Yorke. Ici, plus de conte macabre et onirique mais bien une « initiation » ancrée dans la sinistre réalité. Et justement, quitte à rester à Berlin partahé en deux, l’ambiance insidieuse et le suspense croissant de Possession (film bien trop méconnu à mon goût) n’est pas bien loin! La poignée de passages ésotériques sont un autre atout du film, riches en symbolisme, quelque part entre Refn et Lynch, autant dire un véritable régal pour les yeux. Et que dire de la scène où Elena Fokina se fait malmener d’une façon particulièrement vicieuse? Jessica Harper fait un caméo, ce qui fait toujours plaisir. On regrettera par contre une longueur excessive (2h30 tout de même), la danse contemporaine qui me laisse plus que perplexe (n’étant pas du tout sensible à cette farce qu’est l’art contempourri), la profusion de personnages secondaires pas vraiment intéressants et Dakota Johnson qui est loin d’incarner une héroïne mémorable. A voir si le film a été charcuté au montage, ce qui ne serait pas étonnant vu le rendu final! Dommage, vraiment dommage pour ce remake courageux et inspiré!

Quelques pistes de lecture si ça vous intéresse !

Note: Curiosité

https://www.imdb.com/fr/title/tt1034415/

Bisseries: Black Sheep (2006), Happy Birthday To Me (1981)

Black Sheep: Que dire de ce sympathique métrage nous proposant une version alternative et fraîche du zombie? Sorte de délire de sale gosse poussé à son paroxysme façon Troma (mais en plus sage), tout le monde en prend ici pour son grade: des écologistes activistes aux méchants capitalistes prêts à tout pour l’appât du gain… y compris certaines expériences génétiques pour le moins risquées! Prenant place en Nouvelle-Zélande (autant vous dire que les paysages sont à tomber), au sein d’une ferme caprine et d’une vieille rivalité fraternelle pour introduire ses moutons zombies (et ses « mouton-garous »), le métrage s’avère être une comédie réussie et bien rythmée, oscillant entre le gore gratuit et un humour (parfois) un peu plus subtil. Conscient de son manque de moyens qu’il assume pleinement (les effets spéciaux sont d’ailleurs tout à fait honorables), à ranger entre un Braindead et Le Loup Garou de Londres, ce Black Sheep vous fera assurément passer un bon moment! Une suite serait visiblement en préparation!

Note: Curiosité

https://www.imdb.com/fr/title/tt0779982/

Happy Birthday To Me: Autre slasher ayant bénéficié d’un certain culte mais qui reste plutôt méconnu chez nous, Happy Birthday possède une grande force: celle de maîtriser son suspense jusqu’à la toute fin! Et mine de rien, pour un sous-genre aussi standardisé que le slasher, ça fait une grande différence! La final girl… vous la connaissez sûrement puisqu’il s’agit de Melissa Sue Anderson, une des actrices vedettes de La Petite Maison dans la prairie… qui ici s’en sort très honorablement! Si la plupart des meurtres sont filmés en hors champ, le résultat final ne nous est pas épargné… et ces premiers sont tout de même assez vicieux et originaux pour marquer les esprits! Multipliant habilement les fausses pistes (on est clairement ici dans un whodunit teinté de giallo) grâce au passé de son héroïne jusqu’à une fin poisseuse en diable (et son double twist infernal), soignant sa photo et sa mise en scène (il faut dire que Jack Lee Thompson est loin d’être un débutant), ce métrage figure sans mal dans les plus beaux représentants du genre pendant son âge d’or… avec en prime un sous-texte sur la lutte des classes plutôt appréciable! On regrettera cependant des liens très confus entre les personnages (j’ai passé le film à me demander qui était en couple avec qui, par exemple), une absence de version director’s cut (plus de sang, bordel!) et le choix d’un titre qui spoile bien trop! Mais ça c’est pour pinailler car le film rentre sans mal dans mon top 10 slashers!

Note: Curiosité

https://www.imdb.com/fr/title/tt0082498/

Bisseries: X-Files: Combattre le futur (1998), Night of the Creeps (1986)

X-Files: Combattre le futur Ce serait peu exagéré que de dire que X-Files a traumatisé toute ma génération (celle de la fin des années 1980/début 1990 donc) et passablement marqué d’une pierre blanche l’univers des séries, comme Twin Peaks avant elle… mais ce sera justement l’objet d’un prochain dossier thématique! En tant que gros fan de la série, il était grand temps de revoir ce premier film. Sorti entre les saisons 5 et 6 (à l’origine, il devait sortir après la troisième), on y retrouve tous les ingrédients principaux qui ont fait son succès: intrigue conspirationniste autour de l’huile noire comme arme biologique (un des fils rouges de la série… impliquant gouvernement, CIA et aliens), inévitable destruction des preuves à la fin du métrage (un gimmick plutôt frustrant d’ailleurs), complémentarité et tension sexuelle entre Mulder et Schully dont l’avenir au FBI reste incertain, touches d’humour, personnes bienveillants sortis de nulle part… mais également ses principales faiblesses: intrigues trop grosses pour être totalement crédibles, méchants trop permissifs et ambivalents envers notre duo d’enquêteurs paranormaux,… Derrière la caméra, c’est Rob Bowman, qui avait déjà signé plusieurs épisodes de la série et ça se ressent dans la cohérence du récit, même si par moments, ça manque de faste. Le métrage est bien rythmé, avec des effets spéciaux corrects. On retrouve évidemment des personnages récurrents de la série: Skinner, l’homme à la cigarette et le Syndicat, les Lone Gunmen,… ainsi que de jolies références à Alien et The Thing qui font plaisir! Un thriller honnête et « doudou » donc, qui ne s’en sort pas si mal pour un univers de série porté sur grand écran (même s’il est vrai qu’on a parfois l’impression de regarder un long épisode de celle ci… qui ne fait pas avancer grand chose d’ailleurs) et que l’on recommandera en priorité aux fans de la série ainsi qu’aux curieux!

Note: Curiosité

Night of the Creeps/La Nuit des sangsues: Dans la veine de The Blob, voici un métrage des eighties léger et généreux rendant un très joli hommage aux films de SF/épouvante des années 1950! Au carrefour entre thématique zombies (ceux de Romero) et bizarreries cronenbergiennes (Frissons surtout), doté d’effets spéciaux gore crédibles et d’un rythme soutenu, cette comédie/teen movie diablement efficace (accessoirement le premier métrage de Fred Dekker… qui signera The Monster Squad un an plus tard) est aussi l’occasion de revoir le génial Tom Atkins dans le rôle d’un commissaire truculent et clairement dépassé par les évènements! Ici des sangsues (limaces?) extraterrestres ont la fâcheuse tendance à investir le cerveau d’adolescents pour en prendre le contrôle… les transformant du même coup en zombies! Et comme si cela ne suffisait pas, l’humour s’y fait parfois méta, entre deux bizutages de fraternité! Clairement un film à (re)découvrir!

Note: Solide

https://www.imdb.com/fr/title/tt0091630/

Théma: Zombiexploitation, plus panurgique, tu meurs?

(Retranscription améliorée du podcast #1 d’octobre 2020)

Drôle succès que celui de la figure du zombie! Elle qui n’intéressait que cinq à dix réalisateurs par an depuis La Nuit des morts-vivants a littéralement envahi le grand écran durant les décennies 2000 et 2010 (plus de 150 films recensés sur cette période, soit une vingtaine par an au plus fort de la « zombie mania »). Quasimment boudée durant les 70-80’s alors que le cinéma d’exploitation se focalisait sur les cannibales, les slashers, les nazis (si, si), les rape & revenge, les vigilantes et les giallo, souvent à grands coups de gore et de sexe gratuits, le zombie menait sa petite vie et ne semblait intéresser que de rares réal comme Lucio Fulci et Amando de Ossorio. Avant de faire un retour fulgurant dès 2002! Et si le soufflet retombe dès 2014-2015, l’intérêt qualitatif de ces films, lui, fut évidemment très discutable. Alors que la figure du zombie s’imposait partout comme un élément de pop culture, des zombie walk aux vitrines de magasin en passant par les jeux vidéos, retour (rapide) sur cinq films majeurs et qualitatifs de la décennie 2000!

28 Jours plus tard (2002, Danny Boyle): Un des films qui a sans doute lancé la grande « zombie mania »! Son principal intérêt réside dans le réalisme de l’aspect survie et post-apocalyptique de grande ampleur (on est pourtant des années avant Je suis une légende et The Walking Dead) qui occupe une bonne moitié du film. Hélas, l’autre partie plombe totalement le film en empilant les clichés et les non sens pour accentuer son côté action…comme beaucoup de films de survie manichéens. On sauvera juste l’apparition d’une nouvelle forme de zombie: l’infecté, plus rapide et vorace que son cousin made in Romero!

https://www.imdb.com/title/tt0289043/

REC (2007, Jaume Balagueró et Paco Plaza): Voici un film qui, au delà de proposer un métrage nerveux et ingénieux d’infectés (encore peu fréquents à l’époque), a aussi relancé la mode du found footage, peu de temps avant Cloverfield et quelques mois après Paranormal Activity ! On n’évite pas hélas les clichés propres au found footage/cinéma d’horreur: héroïne insupportable qui hurle pour rien, cadrage tellement aléatoire par moments que le vomi pointe le bout de son nez, caméra incassable et j’en passe! Mais j’ai rarement vu un métrage aussi bien maîtrisé en terme d’immersion et de tension! Aucune idée de ce que valent les suites par contre…

https://www.imdb.com/title/tt1038988/

Pontypool (2008, Bruce McDonald): Assurément, le plus original des films présentés ici! Un huis clos bien rythmé et réaliste, mettant en scène un postulat simple mais audacieux (et peut être, c’est vrai, trop peu cinématographique pour permettre aux spectateurs de rentrer dans le film dès le départ) sur la façon dont l’épidémie se propage. Il m’a fallu deux visionnages pour l’apprécier et analyser totalement la chose mais c’est justement ce type d’ovnis qui redonne espoir dans le genre! Pontypool risque bien de vous tenir en haleine jusqu’au bout!

https://www.imdb.com/title/tt1226681/

Bienvenue à Zombieland (2009, Ruben Fleischer): Sympathique comédie bien rythmée et inventive sur la thématique zombie (tentative déjà lancée avec Shaun of the Dead en 2004), menée par une belle brochette d’acteurs et présentant un dosage idéal entre humour, action et gore. On peut reprocher au film de manquer un peu de fond mais il s’agit d’une première réalisation et pris comme un pur divertissement, il fait très bien le taf! Dernier train pour Busan utilisera d’ailleurs plus ou moins la même recette avec succès quelques années plus tard. Embarquez donc pour ce road trip déjanté!

https://www.imdb.com/title/tt1156398/

The Walking Dead (2010-2022, Frank Darabont): Voilà une série qui a su faire rentrer l’horreur zombie dans beaucoup de foyers! Scénarisé initialement par Darabont (oui, celui qui a su adapter Stephen King au cinéma), TWD est une belle réussite en terme de rythme, d’écriture des personnages et d’effets spéciaux. La première saison est même un modèle de réalisme question survie. Hélas, comme beaucoup de séries à succès, elle se perd dans un nombre excessif de saisons (dont une sur deux est franchement moyenne passé les trois premières), d’épisodes et de personnages… la qualité et le rythme des intrigues ne suivant pas! Personnellement, j’ai décroché dès la sixième mais on peut tout de même saluer l’effort de proposer un récit différent de celui des comics originels.

https://www.imdb.com/title/tt1520211/

D’ailleurs, vous êtes vous seulement demandé pourquoi la figure du zombie intéressait autant? Tout simplement parce qu’il est le monstre moderne le plus proche de nous. Il n’a donc aucun mal à réfléter nos angoisses, nos tabous, nos peurs (à commencer par celle de l’aliénation, de la maladie ou de la mort) mais aussi nos sociétés actuelles dans ce qu’elles ont de plus laid, de plus malade! Ce que d’ailleurs Romero ne se privait pas de faire dès qu’il a su extirper la créature de ses racines vaudous! Hélas peu de métrages récents exploitent cet aspect du zombie, lui préférant le gore, le sensationnel… bref, du divertissement pur et dur!

Pour aller plus loin:

https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-chemins-de-la-philosophie/anthropologie-du-zombie-4944629

https://www.lemonde.fr/pixels/article/2018/10/31/le-zombie-parle-de-la-peur-de-la-destruction-de-l-humanite_5377107_4408996.html

Maintenant qui blamer pour ces deux décennies de films navrants? Les spectateurs aux goûts souvent discutables? Les producteurs peu scrupuleux? Les réalisateurs fainéants sans trop d’originalité? A l’instar de l’éternelle question de l’oeuf et de la poule, tant qu’il y aura des cons pour aller voir des nulleries au cinéma… ne vous étonnez pas de voir le cinéma de genre régulièrement pollué par ce genre de propositions (comme au pif, World War Z), lui qui fonctionne désormais par effets de mode. C’est entre autres pour cela que l’on ne s’attarde pas sur les mauvais films et les nanars sur ce blog: il y a bien assez de tri à faire parmi les sorties hebdomadaires pour dénicher de rares pépites. Alors autant s’épargner les métrages dont l’affiche a déjà une odeur suspecte!

Et si après ce petit dossier, vous avez encore faim (de chair fraîche), voici mon top 10 personnel des films de zombies… bien rétro, bien bisseux!

  1. La Nuit des Morts-Vivants (George Romero, 1968): Le film qui a véritablement ouvert le bal des zombies modernes et qui n’a pas perdu de sa force thématique au fil des années!
  2. Le Massacre des Morts-Vivants (Jorge Grau, 1974): Déjà chroniqué ici!
  3. La Chevauchée des Morts-Vivants (Amando De Ossorio, 1976): Déjà chroniqué ici!
  4. Dawn of the Dead/Zombie (George Romero, 1978): Film bien plus politique et avant gardiste qu’il n’y paraît! Jetez aussi un coup d’oeil à son superbe remake survitaminé L’Armée des Morts (Zack Snyder, 2004)!
  5. L’Au-Delà (Lucio Fulci, 1981)… Tentez d’ailleurs son Frayeurs, dans la foulée (1980): On consacrera de toute façon un dossier à ce réalisateur hélas sous-estimé mais aux ambiances uniques!
  6. Le Jour des Morts-Vivants (George Romero, 1985): Le dernier grand film du réal sur le sujet… avant qu’il ne commence à salement radoter!
  7. Simetierre (Mary Lambert, 1989): Correcte adaptation d’un des meilleurs romans de Stephen King, plus sobre que les autres films de ce top mais néanmoins marquante dans ses thématiques!
  8. Dellamorte Dellamore (Michele Soavi, 1994): Pépite méconnue et variation onirique sur la thématique zombie, on va d’ailleurs se revoir le film ensemble!
  9. I, Zombie: The Chronicles of Pain (Andrew Parkinson, 1998): Pépite quasi inconnue du public de genre qui a déjà fait l’objet d’un podcast et dont on va reparler prochainement.
  10. Planet Terror (Robert Rodriguez, 2007): Parce que quand on pense exploitation assumée, zombies, punchlines et fun, c’est le film parfait! Avec un succulent casting à la clé!

Bisseries: L’Invasion des morts-vivants (1966), Manhunter (1986)

L’Invasion des morts-vivants/The Plague of the Zombies: Ouvrant une voie royale pour un certain George Romero et autres Lucio Fulci, ce film vaut surtout le coup d’oeil pour sa relecture moderne de la figure du zombie, désormais pourrissant à souhait, sortant directement de sa tombe! Reprenant tout le décorum vaudou (alors en vogue dans les films de zombies de l’époque) sans en oublier le cahier des charges de la Hammer pour autant (scènes extérieures nombreuses, décors splendides – déjà utilisés pour les deux premiers Dracula avec Christopher Lee et La Femme Reptile du même réalisateur-, maquillages efficaces, personnages bien campés -mention spéciale à John Carson impeccable dans son rôle de châtelain-), le métrage propose aussi quelques petites originalités ça et là qui rendent son visionnage agréable! On est pas dans le haut du catalogue des britaniques mais il faut bien reconnaître que ce The Plague est tout à fat honnête au vu de son budget! On ne va pas tarder à entamer officiellement un cycle Hammer Films, d’ailleurs, tellement je manque de références pour les films de cette époque. A noter que c’est l’unique film du studio anglais qui traîte de cette thématique, aussi surprenant que cela puisse paraître!

Note: Curiosité

https://www.imdb.com/title/tt0060841/

Manhunter/Le Sixième Sens: Première adaptation de Dragon Rouge de Thomas Harris, ce troisième film de Michael Mann ne démérite pas à côté du mythique Le Silence des Agneaux, grâce à un joli casting (William Petersen, Tom Noonan, Brian Cox), une mise en scène, des lumières et une bande-originale aux petits oignons (le final sur In a gadda da vida, putain!). Subtile (le manichéisme n’est pas vraiment la tasse de thé du réalisateur et c’est tant mieux) et poisseuse à souhait, cette enquête opposant un profiler jusqu’au boutiste et une paire de serial killers machiavéliques (Cox campe un Hannibal Lecktor qu’on verra finalement peu mais qui marquera d’autant plus par son détachement quasi inhumain) vous tiendra en haleine tout au long de ses deux heures! Moins dans la surenchère visuelle que la trilogie qui suivra (Le Silence des Agneaux, Hannibal, Dragon Rouge) certes, mais au moins tout aussi fascinant de par l’ambivalence de son protagoniste et ses ambiances comme les eighties savaient si bien les faire!

Note: Solide

https://www.imdb.com/title/tt0091474/

Bisseries: Messiah of Evil (1973), L’Emmurée Vivante (1975)

Messiah of Evil: Entamé il y a des années, il était temps de ré-essayer celui ci! Il faut dire que le rythme du métrage rebute pas mal le spectateur non aguerri! Et finalement, on découvre un film avant gardiste et unique en bien des points! Côté points forts, l’ambiance cauchemardesque/lovecraftienne à souhait (façon Le Cauchemar d’Innsmouth), la variation moderne sur la thématique zombie (ou plutôt goule/vampire) des années avant le Zombie de Romero et évidemment les décors inquiétants comme jamais/jeux de lumière (Mario Bava n’est jamais loin). Côté plombs dans l’aile maintenant: le rythme sous laxatif donc, les personnages aux réactions lunaires (en particulier le trouple) et la bande-originale quelquefois à la ramasse. Un film fatalement inégal certes mais qui reste une véritable expérience cinématographique, tout en suggestions, avec de superbes passages hallucinés. Bref de l’épouvante vintage dans le sens noble du terme, à ranger sans forcer à côté d’un Carnival of Souls!

Note: Curiosité

https://www.imdb.com/title/tt0071396/?ref_=nv_sr_srsg_0

L’Emmurée Vivante: Véritable pépite vintage et dernier giallo de ce cher Lucio Fulci avant de basculer dans sa période zombies 1979-1981 (L’Eventreur de New York étant plutôt un sympathique mélange de slasher et de giallo comme La Baie Sanglante de Bava ou encore Torso de Sergio Martino) qui se concentre totalement sur son scénario et son twist final (génial pour l’époque) au lieu de donner bêtement dans les codes du genre (sexe, violence, jeux de lumières,…). Dans celui ci, les notions de machination, de destin et de tragédie (propres aux gialli et aux thrillers) prennent tout leurs sens (Fulci aurait été passablement marqué par les travaux d’Antonioni), je ne vous en dirais pas plus! On appréciera au passage l’excellente prestation de Jennifer O’Neill (vue également dans Scanners) et la partition mémorable de Fabio Frizzi! Si vous devez vous faire un seul giallo du Monsieur, c’est celui ci, en gardant à l’esprit que ce n’est pas le plus graphique (même si la mise en scène vaut largement le coup d’oeil)!

Note: Solide

https://www.imdb.com/title/tt0075614/?ref_=nm_flmg_dr_27

Bisseries: Halloween 3 (1982), Réincarnations (1981)

Halloween 3 (Le Sang du Sorcier): Vous connaissez certainement le contexte, Halloween 3 a constitué une tentative de faire de la saga une anthologie autour de la fête d’Halloween (à l’origine la fête celtique de Samhain), Carpenter refusant de réaliser une suite mais voulant tout de même garder une oeil sur son bébé en tant que producteur. Les fans, déçus de ne pas y retrouver Michael Myers et du gore à gogo, bouderont le film et on repartira sur des bases plus classiques dès le quatrième opus. Depuis sa sortie, le métrage a heureusement trouvé son lot de défenseurs. Ayant découvert ce métrage tout jeune, j’avoue que pour moi aussi, l’incompréhension fut grande de ne pas apercevoir The Shape de tout le métrage… Il était donc temps de le redécouvrir car son ambiance poisseuse (finalement assez proche de l’univers de Big John) me hantait toujours!

Et j’ai eu du nez: Le Sang du Sorcier se révèle un bon film bis, plein de qualités comme on les aime! Réalisé par Tommy Lee Wallace (ami de longue date de Carpenter et habitué du genre horrifique), à mi chemin entre Mondwest, Invasion Los Angeles, Twin Peaks et Soleil Vert (oui, rien que ça), ce troisième opus narre l’enquête d’un médecin (Tom Atkins, vu dans Fog, New York 1997, Maniac Cop,…) sur un mystérieux assassinat…ce qui le conduira à découvrir une machination de grande envergure dans une ville sans histoire. Conspiration dont l’échéance est fixée…le soir même d’Halloween! Bien rythmé, avec une mise en scène correcte, mélangeant habilement les genres (thriller, SF et épouvante…ça ne vous rappelle rien?) et doté de FX parfois proches du body horror (même si fatalement datés), ce troisième opus se laisse suivre sans mal pour peu qu’on rentre dans cette histoire classique en apparence (peut être son vrai point faible, avec une certaine avarice en scènes chocs et une romance inutile mais tellement récurrente à l’époque) et qu’on abandonne l’idée de voir un slasher. On appréciera aussi le nouveau thème musical (Carpenter himself), le folklore autour d’Halloween et ses racines celtes (même si on évite pas les sempiternels clichés merdiques sur le paganisme), la réflexion sur la propagande médiatique et le consumérisme, le sacrifice décomplexé de gamins ou encore une fin…mmh idéale? Une critique et un fatalisme chers à Carpenter, je vous disais! Bref, avec autant de bonnes idées, on ne peut donc que saluer cette tentative (par moments une peu bancale, c’est vrai) de renouveller la saga qui avait déjà fait le tour de sa propre histoire en deux films (rappelons que Myers meurt à la fin du second opus). Même si l’histoire en a hélas décidé autrement…pour les inconditionnels du premier volet dont je suis!

Note: Solide

https://www.imdb.com/title/tt0085636/?ref_=nm_knf_i1

Réincarnations: Toujours dans la veine des séries B ayant eu leur petit succès, Réincarnations/Dead & Buried de Gary Sherman (Poltergeist 3) est plutôt bien côté. A raison car question rythme et scènes macabres montrées frontalement, ça vaut largement le coup d’oeil! Robert Englund y incarne un petit rôle et pas mal de coïncidences laissent à penser que le film a très probablement inspiré Wes Craven pour Les Griffes de la Nuit. Toute l’enquête sur fond de sorcellerie/conspiration dans un petit village rappellera tour à tour des classiques comme Twin Peaks, Le Locataire, Vaudou (car oui, Réincarnation est bien une variation originale sur la figure du mort-vivant), The Wicker Man…et ça, on ne va pas se le cacher, ça fait toujours plaisir! Question twists, le métrage tient la route même si on a vu plus original. De belles idées, de bons acteurs et de jolis maquillages (Stan Witson entre autres) à retenir en tout cas! Notons aussi que c’est Dan O’Bannon (faut il encore le présenter?) et Ronald Shusett (son compère sur Alien, Total Recall) au scénario, autant dire de sacrés arguments de vente! Qu’est ce que vous attendez pour aller le découvrir?

Note: Solide

https://www.imdb.com/title/tt0082242/?ref_=nv_sr_srsg_0

Bisseries: Maps to the stars (2014), Le Commando des morts-vivants (1977)

Maps to the stars: Cosmopolis (dont ce métrage n’est pas très éloigné thématiquement) étant sans l’ombre d’un doute ma pire expérience en salles (vous savez ce genre de films où vous vous demandez ce qui vous retient de partir en plein milieu), j’ai bien traîné pour découvrir le dernier Cronenberg en date! Et…ma foi, celui ci est assez intéressant! Bien sûr, c’est à des années lumières du Cronenberg d’antan et de sa body horror frontale mais Maps poursuit finalement l’évolution logique de son cinéma depuis M.Butterfly/Crash. L’ « horreur » cérébrale c’est bien aussi, de temps en temps!

Ce film c’est évidemment une satire du microcosme hollywoodien et de ceux qui le font vivre, enfants comme adultes, avec le lot de saloperies qui vont avec: névroses, traumas, excès, mesquineries, relations d’intérêt,… Son jumeau Cosmopolis proposait, à sa…façon, un regard acéré sur nos sociétés modernes, dont l’humanité semble de plus en plus absente quand elle n’est pas purement broyée. Ici c’est le cocon familial qui trinque sévère! A ce petit jeu là, le casting s’en sort bien (Moore et Wasikowska en tête). Le centre du récit, lui, est constitué de deux histoires qui s’entrecroisent au travers d’un truculent personnage jusqu’à la tragédie finale où on arrivera à y voir un peu plus clair. Et c’est particulièrement sur cet aspect que le canadien se montre le plus intéressant: dans le jeu de pistes, les sous-entendus, les répercussions temporelles, le symbolisme,… Le tout teinté de fantastique et d’humour absurde comme dans un bon Lynch (période Mulholland Drive, forcément) ou même un métrage des frères Cohen. Mieux rythmé, moins verbeux que son prédécesseur, Maps peut dérouter mais il ne laisse pas le spectateur en chemin. Si la mise en scène est devenue propre, c’est n’est qu’en apparence et c’est pour mieux mettre à nu les monstres du quotidien. Point d’individu qui mute et menace la société (encore que) mais une société en mutation qui finit par créer ses propres freaks, qui par manque d’alternative, finissent fatalement par se vampiriser entre eux. Je sais que le métrage a rebuté pas mal de monde lors de sa sortie (pour les raisons citées plus haut mais aussi pour un manque certain de subtilité et des FX déjà datés) mais ça se regarde largement, même si on a bien évidemment conscience qu’on aura pas droit à grand chose de novateur!

Note: Curiosité

https://www.imdb.com/title/tt2172584/

Le Commando des morts-vivants/Shock Waves: Horreur marine en plein jour, surfant sur le mythe de l’ésotérisme SS mais également variation sur la thématique zombie (ici les créatures peuvent survivre sous l’eau), l’île maudite et le vaisseau fantôme, ce Shock Waves déborde d’idées originales mais mal exploitées à mon goût! La faute certainement au budget de 150 000 dollars (même si les effets spéciaux sont réussis) et aux conditions de tournage visiblement exécrables. Le rythme général et les acteurs (Caradine senior, Brooke Adams et Peter Cushing pour les plus connus) contrebalancent largement le problème. Loin d’être un nanar comme j’ai pu le lire à maintes reprises, le métrage se permet même de détourner les codes de l’horreur avec un hôte finalement bien plus accueillant qu’il en a l’air! Il est clair que niveau ambiance, on est plus proche du film d’aventure que de l’épouvante pure (ne vous attendez pas à du gore), sorte de Zombi 2 sans l’aspect craspect! Etonnant!

Note: Curiosité

https://www.imdb.com/title/tt0076704/

Bisseries: Le Mort-vivant (1974), Teeth (2008)

Le Mort-vivant/Dead of Night: Sorti la même année que Black Christmas du même réal, Le Mort-vivant est un drame fantastique/horrifique solide comme les 70’s en proposaient régulièrement (au pif Dead Zone, Carrie,…). Anticipant la vague de films sur les traumas du Vietnam en faisant revenir à la vie un soldat, ce film s’avère être une jolie variation sur la thématique zombie, au final plus sociale que réellement horrifique. En quête perpétuelle de sang pour pallier à sa dégradation physique, Andy va se retrouver au coeur d’une enquête policière et fera au passage exploser les tensions familiales latentes. Richard Backus est parfait dans le rôle du revenant, marqué par la guerre jusque dans sa psyché profonde (certains y verront sans doute une revanche divine du soldat mort au combat envers une Amérique peu soucieuse du sort des ses enfants). Quelques ombres au tableau: un rythme globalement assez lent, Lynn Carlin dans un rôle irritant au possible (voire incompréhensible par moments) et une thématique post Vietnam malheureusement peu fouillée. Il s’agit aussi du premier film sur lequel a officié Tom Savini comme maquilleur (et on peut dire que c’est déjà très bon).

Note: Curiosité

https://www.imdb.com/title/tt0068457/

Teeth: Film que je voulais voir depuis longtemps (il faut dire que le concept de base envoie quand même du bois), ne sachant pas trop à quoi m’attendre, ce Teeth s’avère finalement être une correcte et intelligente comédie noire (et non pas un pur teen movie, ni du body horror grand public, comme on aurait pu le croire, ouf!), se permettant même un final doublement glauque. Avec un bon équilibre entre gore et fable adolescente (au féminisme subtil…aussi rare qu’appréciable en ces sombres jours), Teeth est aussi une allégorie sur l’hypocrisie de la société américaine et surtout une révélation: Jess Weixler, qui porte totalement le film sur ses épaules!

Note: Curiosité

https://www.imdb.com/title/tt0780622/