Bisseries: La Maison aux Fenêtres qui Rient (1976), Maléfique (2002)

La Maison aux fenêtres qui rient : Si son titre peut prêter à sourire, voilà un (faux mais on y reviendra) giallo rural qui risque bien de vous rester en tête, ne serait ce que pour ses ambiances uniques ou encore ses nombreuses scènes d’extérieur !  Prenant la forme d’un whodunit vintage/film d’épouvante, cette enquête sur un peintre maudit au cœur d’un petit village d’Emilie Romagne, portée par une jolie galerie de personnages étranges (et bien interprétés) et surtout une gestion admirable du suspense, marque effectivement de par ses libertés avec le giallo avec lequel il est assimilé -à tort- (ici les meurtres sont suggérés, pas de stylisation du tueur, pour ne prendre que deux exemples) dont il garde surtout la jolie photographie (Pasquale Rachini) et évidemment l’atmosphère mortifère/décrépie qui se dégage de la pellicule à chaque seconde. Ce que viendra confirmer une nouvelle fois son final, à la fois cruel et ingénieux ! Je dois par contre avertir les réfractaires au rythme lancinant, vous allez souffrir! Une œuvre certes imparfaite, signée Pupi Avati, mais unique, avec une portée sociologique finalement très proche de celle de La Longue Nuit de l’Exorcisme du regretté Lucio Fulci (encore et toujours lui)! Avec un zeste pré-Twin Peaks par dessus, si si!

Note : Solide

https://www.imdb.com/fr/title/tt0074287/

Maléfique : Il va falloir se calmer sur les films lovecraftiens, parce qu’on aura bientôt plus rien à se mettre sous la dent quand on va attaquer le cycle sur l’horreur cosmique ! Toujours est il que ce Maléfique d’Eric Valette (ex-metteur en scène des Guignols de l’info) a gagné une petite réputation au fil des ans et que le film était sur ma liste depuis un moment ! S’il n’échappe pas à certains défauts typiquement français (comme un certain manque de subtilité dans l’écriture de ses personnages qui ne dépassent hélas que rarement leur carcan de stéréotypes), ce huis clos carcéral, porté par une belle brochette d’acteurs, dans lequel quatre prisonniers découvrent un manuscrit étrange vire vite au thriller fantastique, malin et nihiliste où l’ombre de Lovecraft plane tout en restant suffisamment dans le suggestif et le minimalisme  pour ne pas sombrer dans le grotesque. Saluons également son rythme et ses effets spéciaux qui maintiennent bien en haleine (même si encore une fois, amateurs de films survitaminés, la majorité des films chroniqués ici bas ne sont pas pour vous) ! Un premier long métrage honnête à l’ambiance unique et au budget qu’on imagine tout petit!

Note : Curiosité

https://www.imdb.com/fr/title/tt0309832/

Bisseries: Le Solitaire (1981), La Chose Derrière la Porte (2023)

Mmh tout compte fait, on va reprendre les publications ici plus tôt que prévu… mais ne vous attendez pas à une grosse régularité jusqu’à janvier-février…

Le Solitaire/Thief : Plongez dans le Chicago des eighties avec ce premier long métrage de Michael Mann ! Un thriller poisseux et réaliste où les rapports entre voyous et flics sont légèrement plus flous qu’on ne le pense et les rédemptions ne se passent jamais comme prévu (façon L’Impasse). Servi par une belle mise en scène et une jolie distribution (le couple James Cann/Tuesday Weld en tête), cette adaptation du roman The Home Invaders (narrant l’histoire d’un braqueur solitaire aspirant à raccrocher les gants) est de ces métrages oubliés qui ne payent pas de mine sur le papier mais dont la strcture même est faite en sorte que vous n’en sortiez pas indemne. Impossible de ne pas penser à Drive, tellement Refn multipliera les points communs/hommages… jusque dans sa bande-son électronique (ici, ce sont les excellents Tangerine Dream qui s’en occupent). Un premier film qui, comme souvent, contient en germe les thématiques à venir du réalisateur dont le métrage suivant, Manhunter, sera dans la même veine !

Note : Solide

https://www.imdb.com/fr/title/tt0083190/

La Chose derrière la porte : Les bons métrages inspirés par l’univers de Lovecraft, c’est comme les bonnes adaptations des romans de Stephen King, généralement c’est si rare qu’on n’a pas forcément envie de les garder pour soi ! Ici l’histoire est plutôt simple : une veuve tente de ramener à la vie son mari décédé dans les tranchées de la Première Guerre mondiale. Un acte qui aura bien sûr des conséquences… Outre la prestation étonnante de Séverine Ferrer (un nom qui parlera forcément aux gens de ma génération qui ont grandi en regardant M6), c’est avant tout dans son visuel et ses ambiances que ce premier long métrage de Fabrice Blin marque les esprits : on navigue entre onirisme, fantasmes, hallucinations (façon Lucio Fulci) avec un sentiment de paranoïa grandissant ! Outre la très jolie photo, il faut bien reconnaître que l’on a là un film très honnête au vu du scénario qui annonçait un déroulé plutôt prévisible ! Petit budget oblige, la sobriété est de mise, dans les dialogues (au moins on évite le pathos insupportable de beaucoup de films français) comme dans les effets spéciaux (très corrects), ce qui renforce la bizarreté contemplative, la solitude et le basculement vers la folie de l’héroïne! Le film convoque également d’autres œuvres phares du genre comme Evil Dead, Re-Animator, Invasion of the Body Snatchers et bien évidemment la zombiexploitation italienne de la grande époque (plutôt le genre de came qu’on aime ici bas), le tout saupoudré de folk horror. Et même un peu de The Last of Us pour ceux qui auront la réf’ (bon, c’est pas The Hallow non plus mais tout de même)! Ca sent l’amouteux de genre, tout ça! On appréciera aussi le rythme lancinant (raccord avec la mise en scène), les décors/costumes et la bande son (Raphael Gesqua) réussis qui font de ce semi-huis clos rural et fantastique… une jolie bizarrerie française à découvrir!

Note : Curiosité

https://www.imdb.com/fr/title/tt10340360/

Bisseries: Censor (2021), Hardware (1990)

Censor: Surprenant film ayant pour thématique principale les video nasties (auxquelles on consacrera un cycle tôt ou tard, ne serait ce que pour compléter un peu notre watch list, même si un certain nombre sont déjà chroniquées ici) et la rigidissime époque thatchérienne qui va avec, il faut bien avouer que Censor contient de bonnes idées de mise en scène et une imagerie vintage réussie (passablement inspirée par le giallo), au delà de cette sympathique mise en abyme qui régalera tout amateur de genre (les yeux les plus affûtés reconnaîtront des extraits de Frightmare, Driller Killer ou encore l’excellent Cauchemars à Daytona Beach). Premier long métrage de Prano Bailey-Bond, ce thriller psychologico-horrifique, porté par la solide Niamh Algar, se distingue aussi par l’ambiance psychotique créée, entre rêves, cauchemars, obsessions et souvenirs du passé (avec une belle lichette de Lynch). Après toutes ces belles propositions, on ne peut que regretter les ressorts tout de même un peu prévisibles de son récit. Dommage…

Note: Curiosité

https://www.imdb.com/fr/title/tt10329614/

Hardware: Ayant entendu parler de ce métrage pour sa BO et le caméo de divers musiciens rock (Fields of Nephilim, Motörhead, P.I.L., Iggy Pop, Ministry, GWAR), il était temps d’enfin passer le pas. Et ma foi, on tient là un représentant tout à fait honnête du cinéma cyber-punk/post-apo! Son réalisateur/scénariste n’est pas un parfait inconnu aujourd’hui puisqu’il s’agit de Richard Stanley, peu productif mais qui s’était illustré il y a quelques années avec (le prometteur mais décevant) Colour Out of Space. Et dès l’intro, on sent qu’on a affaire à un film bis unique et généreux que l’histoire aurait oublié: élements électroniques omniprésents, huis clos urbain, monde dévasté par l’arme atomique, population entassée dans des villes crasseuses où l’on rationne aussi bien la nourriture que l’on contrôle les naissances, membres bio-mécaniques,… si ces éléments (de moins en moins SF hélas) peuvent vous paraître familiers aujourd’hui, ils l’étaient bien moins au moment de la sortie du film (pour rappel, nous sommes neuf ans avant Matrix et un an avant Terminator 2). Terminator, Soleil Vert et RoboCop sont évidemment les grosses influences de ce premier long métrage. Porté par la performance de (la trop rare) Stacey Travis et une belle photographie (ah ce filtre rouge/orange!), Hardware reste un film ingénieux, oppressant, sans concession et plutôt convaincant vu son ridicule budget (1,5 millions de dollars)!

Note: Curiosité

https://www.imdb.com/fr/title/tt0099740/

Panthéon: I, Zombie: The Chronicles of Pain (1998)

Hé! Si je vous disais qu’un des meilleurs films de mort-vivant est totalement inconnu au bataillon, y compris chez les bisseux? Et qu’il est l’argument parfait pour vous pousser à tenter le visionnage de films à priori fauchés et mal notés… qui se révèlent être de parfaites pépites?

Premier long métrage de l’anglais Andrew Parkinson, I, Zombie (connu également sous les titres francophones Moi, Zombie: Chroniques de la douleur ou Mémoires d’un zombie) est une variation très originale sur la figure du zombie sous la forme d’un drame psychologique, horrifique et introspectif. Le scénario (signé Parkinson également) est pourtant extrêmement simple: Mark, un jeune botaniste se fait mordre par un zombie lors d’une balade champestre. Nous allons alors le suivre dans son petit appartement, au quotidien, dans ses observations/pensées (en bon scientifique qu’il est), sa recherche de chair humaine, spectateur de sa lente dégradation physique/mentale… Car oui, malgré sa nouvelle « maladie », la conscience de notre héros, elle, ne pourrit pas. Huis clos physique, mental et matériel (l’appartement du protagoniste) donc, entrecoupé de souvenirs/rêves/hallucinations (quasi expérimentales par moments) et de changement de points de vue (apportant un peu de « légèreté » au récit et montrant quelques scènes d’extérieur), I, Zombie utilise également une voix off, une des grandes forces du film, évitant tout dialogue superflu ou subterfuge artificiel de mise en scène (plutôt ingénieuse ici). Filmé avec les moyens du bord (à savoir une caméra 16 mm) qui renforce son aspect réaliste et documentaire, ce journal de bord filmique touche à des thèmes durs mais profondement humains, bien loin de la simple exploitation horrifique, comme la solitude, l’isolement social et la détresse affective, la folie, la rupture amoureuse, le deuil, la maladie, la mort,… Le spectateur ne peut alors que s’identifier à Mark.

Si son concept minimaliste, son visuel « téléfilm », sa thématique glauque et son rythme lancinant ne plairont clairement pas à tout le monde (évitez de regarder ce film si vous avez une petite tendance dépressive, par exemple), on ne peut que déplorer la rareté de métrages horrifiques parvenant à autant de réalisme et d’intensité dramatique. Car oui, pour les plus aventureux d’entre vous, I, Zombie arrivera à faire émerger de purs moments de spleen (dans la tragédie sans retour possible qui touche Mark) que vous ne retrouverez pas ailleurs. Ici pas de scène d’action spectaculaire, de recherche de remède ou du patient zéro mais bien une agonie interminable sur tous les plans possibles. Le casting est composé de proches ou des connaissances du réalisateur (acteurs de théâtre amateurs pour la majorité). Saluons la performance solide de Giles Aspen (dont c’est hélas le seul et unique film) qui porte totalement le métrage sur ses épaules. Ellen Softley y incarne Sarah, la touchante fiancée de Mark et reviendra dans les autres films du réalisateur. La musique (Parkinson…again!) est simple mais diablement efficace (écoutez moi ça, bord*l!). Côté influences et références, on pensera tour à tour à la body horror de Cronenberg (La Mouche particulièrement), à Tetsuo, au Mort-Vivant, à Martin, à Angst… bref, à tous les films où la véritable monstruosité est le sort réservé au héros (sauf Angst tout de même). Son propos social le rapprochera évidemment d’un Romero. Malgré que le film soit auto-financé, les maquillages sont réussis (Paul Hyett à ses débuts) et là encore, le réalisateur réussit le tour de force de ne virer dans le véritable gore qu’à la toute fin du film. De la même façon, il évite à son drame de basculer dans l’excès de pathos, en supprimant la maximum de longueur ou répétition.

Tourné et monté sur deux ans (il faudra en tout et pour tout quatre ans au film pour sa conception) et passé totalement sous les radars à l’époque de sa sortie (malgré un prix remporté au Festival of Fantastic Films et sa distribution par le magazine Fangoria), cet OVNI audacieux et intelligent connaîtra tout de même une suite spirituelle en 2001, Dead Creatures, du même réalisateur. Son concept sera repris par plusieurs films plus tardifs: Colin, Zombie Honeymoon, Thanatomorphose, Contracted,… Un pur film d’auteur qui vous restera en tête longtemps après le visionnage. Avec plus de budget et une meilleure exposition, je n’ose imaginer l’impact qu’il aurait pu avoir sur le cinéma de genre…

Bonus: Interview du réalisateur en 1998

Note: Pépite

https://www.imdb.com/fr/title/tt0210740/

Bisseries: You’ll Never Find Me (2023), La Sentinelle des Maudits (1977)

On a clairement pris du retard sur l’avancée de nos cycles Hard SF et Conspiracy Thrillers tandis que la « révision » des anciens articles touche à sa fin alors pour vous faire patienter et parce qu’une pause (bien méritée) va s’imposer dès le mois de mai, je vous propose une poignée de bisseries supplémentaires vues il y a quelques mois/années…

You’ll Never Find Me: Petit huis clos rondement mené (autant dans sa gestion du suspense que sa mise en scène) et sans prétention, You’ll Never Find Me est porté par un joli couple d’acteurs inconnus au bataillon (Brendan Rock et Jordan Cowan). Le synopsis est pourtant des plus basiques: un soir d’orage, une jeune femme demande de l’aide à un hermite vivant dans un chalet … mais il semblerait qu’elle n’est pas poussé la bonne porte… Et pourtant, Josiah Allen et Indianna Bell (dont c’est le premier long métrage) propose un thriller paranoïaque soufflant le chaud et le froid parsemé de moments intimistes, de quelques notes d’humour bien senties ainsi que de sacrés moments d’hallucination. Seul défaut, une longueur excessive et un rythme parfois trop distendu. Et une fin finalement un peu prévisible aussi, c’est vrai! Mais ne boudons pas notre plaisir, ce quatuor là a du potentiel!

Note: Curiosité

https://www.imdb.com/fr/title/tt22023218/

La Sentinelle des Maudits: Dans la série des thrillers fantastiques bien poisseux des seventies, je demande La Sentinelle des Maudits! Bénéficiant d’une distribution impressionnante (Raines, Sarandon, Balsam, Wallach, Caradine, Goldblum, Walken et j’en passe), le métrage de Michael Winner se distingue effectivement par son rythme lancinant et une atmosphère paranoïaque/malsaine subtile à classer entre Rosemary’s Baby et Les Autres (qui, et je l’apprends en rédigeant ces lignes, est également inspiré du même roman de Jeffrey Konvitz). Plutôt original donc, ce récit d’une top model emménageant par hasard dans un immeuble qui renferme le secret d’une machination religieuse, même s’il a notablement vieilli (particulièrement son final) malgré des maquillages et effets réussis/généreux. Un film qui reste longtemps en tête car sa force d’évocation, bien aidée par une bande originale efficace (signée Gil Mellé), elle… a très bien traversé les âges!

Note: Curiosité

https://www.imdb.com/fr/title/tt0076683/

L’Envers du Culte: La Revanche de Frankenstein (1958), Fenêtre sur Cour (1954)

La Revanche de Frankenstein: Suite directe de Frankenstein s’est échappé, ce second opus de la Hammer impose le respect. Question casting déjà! On retrouve ici Peter Cushing dans le rôle du cynique docteur, Francis Matthews dans celui de son associé et Michael Gwynn dans celui de la créature revenue d’entre les morts, tandis que Terence Fisher est toujours derrière la caméra. Et ça fonctionne diablement bien! Bien équilibré entre drame, romance, traits d’humour et épouvante, le métrage nous expose une créature bien plus touchante car foncièrement plus humaine que celle précédemment incarnée par Christopher Lee. Porté par des jolis décors (moins marquants que dans d’autres films de la franchise anglaise mais tout de même), entre deux expériences sur la transplantation de cerveau et quelques accès de folie meurtière, La Revanche revient à la base du roman (bien qu’éloigné de lui sur le papier): sonder notre (sombre) nature humaine à travers le jusqu’au boutisme d’un scientifique dérangé!

Note: Solide

https://www.imdb.com/fr/title/tt0050894/

Anecdotes:

  1. Le film utilise une partie des décors du Cauchemar de Dracula sorti la même année.
  2. Ce métrage sera un échec critique pour le public anglo-saxon et il faudra attendre six ans pour que la Hammer lance un autre opus de la saga (sans lien avec les deux premiers).
  3. On retrouve dans ce film Michael Ripper (dans un petit rôle) qui deviendra lui aussi un habitué des films de la Hammer.

Fenêtre sur Cour: Que dire d’original sur ce monument? Que son concept de huis clos ouvert/ »action par procuration » est ingénieux et déjà méta sur la thématique du voyeurisme (non seulement celui de Jefferies -accessoirement photographe- mais aussi du spectateur)? Que le couple archétypal et bien mal assorti joué par (la sublime) Grace Kelly et James Stewart a bien du mal à être crédible aujourd’hui (contrairement à un discours finalement très actuel sur ce qu’est devenue la sordide sphère de la séduction et des relations hommes-femmes) ? Qu’au contraire la photographie de Robert Burks et la mise en scène d’Hitchcock sont toujours aussi diablement efficaces? Que ce film a dû traumatiser Brian de Palma et son Body Double en tête) comme il faut (ne serait ce qu’au travers de ses thèmes principaux: paranoïa, comportement obsessionnel,…) ? Dans tous les cas, Fenêtre sur Cour reste à la fois un joli panorama sur la société américaine de l’époque en pleine Guerre Froide et un thriller prenant, où on doute jusqu’au dernier moment de ce dont le héros (et nous avec) est témoin!

Note: Solide

https://www.imdb.com/fr/title/tt0047396/

Anecdotes:

  1. La cour intérieure façon Greenwich Village a été créée de toutes pièces dans les studios de la Paramount. Certaines actrices ont même vécu dans les appartements le temps du tournage. Un système d’arrosage intégré permettait de simuler la pluie.
  2. Le couple Kelly-Stewart s’inspire de la romance entre Ingrid Bergman et Robert Capa tandis que le scénario est une adaptation de la nouvelle du même nom de Cornell Woolrich.
  3. Ce film remportera quatre oscars: réalisation, scénario, son et photographie. A propos de ce dernier, l’éclairage sur le studio était prérèglé de façon à couvrir une journée entière, nuit inclus!
  4. Tous les voisins montrés à l’écran ont un rapport avec le mariage et le couple. Un véritable miroir aux questionnements de Jefferies!

Bisseries: Dellamorte Dellamore (1994), Suspiria (2018)

Dellamorte Dellamore: Je profite des dernières publications consacrées à notre cycle « Zombie » pour revenir sur ce joyau encore trop méconnu qu’est ce film de Michele Soavi (assurément son meilleur)! Portée par un charismatique Rupert Everett (bien trop rare à l’écran), la sublime (et vénéneuse) Anna Falci et le regretté François Hadji-Lazaro, cette comédie noire sur un gardien de cimetière confronté à une épidémie de zombies au fond de l’Italie rurale alterne entre un cynisme de tous les instants et un surréalisme onirique que n’aurait pas renié Lucio Fulci ni même Jean-Pierre Jeunet! Oui, rien que ça! La photographie baroque et les effets spéciaux sont très réussis et certains plans méritent vraiment le détour! Adapté d’un roman et d’un fumetti de Tiziano Sclavi, le fatalisme dégagé par notre loser magnifique de héros et certains passages à mi chemin entre fantasmes et hallucinations fiévreuses permettent de hisser cette excellente série B parmi les (rares) films de mort-vivants dont vous vous souviendrez longtemps !

Note: Solide

https://www.imdb.com/fr/title/tt0109592/

Suspiria: Il y a des réalisateurs qui aiment bien les défis! En acceptant le remake d’un des chefs d’oeuvre de Dario Argento (une des plus grosses claques artistiques de votre serviteur, au passage), Luca Guadagnino se met sacrément en danger car en dehors d’une fin kistch à souhait, le Suspiria de 1977 n’a pratiquement aucune faiblesse!

Et pourtant, le métrage fonctionne plutôt bien sur ses trois quarts (oui, la fin bisseuse à souhait qui arrive sans prévenir dans ce film à l’esthétique léchée fait vraiment tâche, sans doute un hommage au film originel vraiment dispensable), d’abord grâce à son casting féminin (Swinton, Moretz et Goth en tête mais vu leurs CV respectifs, on commence à avoir l’habitude!), son scénario à plusieurs niveaux de lecture (mais si pas exempt de lourdeurs… bien au contraire!) et son va et vient habile entre drame, thriller et fantastique. Et surtout, surtout, ce Suspiria là n’essaye ni de singer les décors baroques et l’ambiance psychédélique de son aîné ni de ressuciter le giallo. On est ici à Berlin à la fin des années 1970 et la grisaille est partout (merci le Bahaus!), tout comme les fantômes de la Seconde Guerre Mondiale. Le rock progressif venimeux des Goblins a laissé place à la bande-son minimaliste de Thom Yorke. Ici, plus de conte macabre et onirique mais bien une « initiation » ancrée dans la sinistre réalité. Et justement, quitte à rester à Berlin partahé en deux, l’ambiance insidieuse et le suspense croissant de Possession (film bien trop méconnu à mon goût) n’est pas bien loin! La poignée de passages ésotériques sont un autre atout du film, riches en symbolisme, quelque part entre Refn et Lynch, autant dire un véritable régal pour les yeux. Et que dire de la scène où Elena Fokina se fait malmener d’une façon particulièrement vicieuse? Jessica Harper fait un caméo, ce qui fait toujours plaisir. On regrettera par contre une longueur excessive (2h30 tout de même), la danse contemporaine qui me laisse plus que perplexe (n’étant pas du tout sensible à cette farce qu’est l’art contempourri), la profusion de personnages secondaires pas vraiment intéressants et Dakota Johnson qui est loin d’incarner une héroïne mémorable. A voir si le film a été charcuté au montage, ce qui ne serait pas étonnant vu le rendu final! Dommage, vraiment dommage pour ce remake courageux et inspiré!

Quelques pistes de lecture si ça vous intéresse !

Note: Curiosité

https://www.imdb.com/fr/title/tt1034415/

L’Envers du Culte: Scream (1996), Le Monstre (1955)

Scream: Porté par un joli casting féminin (Neve Campbell, Courteney Cox, Rose McGowan, Drew Barrymore) et une paranoïa constante de sa scène d’introduction perverse à souhait jusqu’à son twist final légendaire, Scream a lancé en 1996 la mode du slasher « méta » (vite rebaptisé « néo-slasher ») qui joue constamment avec ses propres codes (même si certains slashers des 80’s le faisait déjà en partie) et qui durera jusqu’aux années 2000 (avant l’invasion « zombie » finalement). Clins d’oeil à Halloween et aux Griffes de la Nuit, ainsi qu’à divers slashers de l’âge d’or, éléments clés indissociables du genre (final girl intelligente, chaste et débrouillarde qui devra lutter contre les traumas de son passé, faux coupables, policiers incompétents, soirée étudiante, scènes lycéennes,…), le film ravira sans mal tous les amateurs de psycho-killers blasés de ce sous-genre (présent!) qui a fait l’erreur de s’enfermer très vite dans ses propres gimmicks (le plus souvent par appât du gain). Il faut dire aussi que Freddy sort de la nuit avait quand même bien défriché le terrain deux ans avant, avec nettement moins de succès ceci dit! Autres points forts: la mise en scène au poil de Craven qui permet des scènes d’action efficaces, un scénario de Kevin Williamson (également responsable de celui de Souviens toi l’été dernier) qui ménage admirablement son suspense, des meurtres inventifs, des touches d’humour appréciables (même si un peu trop présentes à mon goût) et un (maladroit) boogeyman réaliste devenu culte! Avec en prime, une jolie crotte de nez jetée à la face des médias et leur rapport aux faits divers! Malgré tout, on sent un potentiel un peu bridé par son propre concept par moments, comme si Wes Craven, conscient de son talent et de l’impact que pourrait avoir son retour au cinéma de genre (modernisé), n’osait pas se lâcher totalement. De mémoire, les deux opus suivants étaient tout de même plus mémorables sur la gestion de la tension et généreux sur le gore mais ce volet originel a en tout cas l’avantage d’être réaliste et surprenant! Vive Scream!

Note: Solide

https://www.imdb.com/fr/title/tt0117571/

Anecdotes:

  1. Le titre originel du film était « Scary Movie »… De la même façon, la robe que portait Ghostface devait être entièrement blanche mais le rendu était trop proche de celui d’un fantôme.
  2. Le masque de Ghostface s’inspire (entre autres) du tableau Le Cri de Munch ainsi que de l’affiche de l’adaptation cinématographique de The Wall (concept album de Pink Floyd).
  3. Wes Craven n’accepta pas ce projet d’emblée, voulant s’éloigner du cinéma d’horreur.
  4. Roger Jackson, qui donne sa voix aux appels téléphoniques du tueur était totalement inconnu du reste du casting final, pour capter au mieux leurs émotions.
  5. Le script s’inspire du sordide fait divers de 1990, connu sous le nom de Gainesville Ripper. Williamson souhaitait d’emblée faire de Scary Movie une trilogie questionnant les liens entre la violence présente dans la fiction et celle réelle.

Le Monstre/The Quatermass Xperiment: Tout premier succès public de la Hammer Films (et premier volet de la trilogie des Quatermass) et il faut dire que pour un métrage de SF/épouvante des fifties, celui là est assez généreux et inventif! Pas impossible qu’il ait passablement influencé Danger planétaire et L’Invasion des profanateurs d’ailleurs! Doté de jolis effets spéciaux et d’un suspens admirablement géré, Le Monstre figure même parmi les précurseurs du body horror et certains passages vous évoqueront sans doute The Thing (ce film est d’ailleurs un des favoris de Carpenter himself)! Mais ce n’est pas tout, entre la mise en scène admirable et la prestation de Brian Donlevy en scientifique détestable/opportuniste et Richard Wordsworth (qui deviendra un habitué des films de la Hammer) en victime mutante partagé entre sa survie et ce qu’il reste de sa morale humaine, cette chasse à l’homme porteur d’une étrange maladie risque bien de vous tenir en haleine jusqu’au bout! Une jolie découverte quoi qu’il en soit!

Note: Curiosité

https://www.imdb.com/fr/title/tt0049646/

Anecdotes:

  1. Avant cette adaptation cinéma, The Quatermass Experiment était une série TV à succès, produite par la Hammer et diffusée en 1953. Deux autres mini-séries suivront en 1955 et 1958.
  2. Pour le final, une pieuvre vivante a été utilisée, ainsi que des boyaux de vache.
  3. Le « X » du titre fait référence au fait que le film fut le premier métrage de SF a être classé X (interdit au moins de 16 ans) au Royaume-Uni. Ironie du sort, un enfant de 9 ans décèdera d’une maladie cardiaque pendant sa projection en 1956…

Bisseries: Dracula et les femmes (1968), Alien: Covenant (2017)

Dracula et les femmes/Dracula has risen from the grave: Quatrième Dracula de la Hammer, auquel incombe la lourde tâche de succéder au sublime Dracula, Prince des Ténèbres sorti deux ans avant, Dracula et les femmes s’avère être un opus plutôt original et moderne (avec une thématique sur le conflit générationnel et religieux plutôt bien amené) mais bien moins efficace que ses prédécesseurs (malgré une violence revue la hausse)! Christopher Lee est de nouveau de la partie (lui qui voulait ne pas rempiler après Le Cauchemar de Dracula…) mais il n’y aura pas de Van Helsing pour lui tenir tête cette fois ci! C’est Freddie Francis (un autre réalisateur culte de la Hammer) qui remplace ici Terence Fisher au pied levé et nous gratifie de beaucoup de scènes en extérieur… et surtout d’un excellent travail sur les couleurs (qui donnent lieu à quelques moments de poésie)! Les décors sont sublimes, comme d’habitude mais plusieurs défauts et incohérences commencent déjà à entâcher la saga (ce métrage ayant subi pas mal de coupes au montage)… Dracula, muet dans l’opus précédent, se remet à parler, perdant du coup beaucoup de son aura animale. De la même manière, on ne comprend pas pourquoi le célèbre comte choisit d’assouvir sa vengeance sur la nièce de l’exorciste (hormis pour le quota de décolletés généreux, bien sûr) et pas sur ce dernier directement (t’es le Prince des Ténèbres ou quoi?). La scène de résurrection de Dracula semble elle aussi bien forcée (pourquoi deux prêtres iraient se taper deux heures de marche dans les montagnes alors que le Comte est mort depuis belle lurette?). A l’image de cette saga où on ne cesse de convoquer le cadavre du plus célèbre des vampires (et son interprète) jusqu’à la lie… Le bon jeu d’acteurs et l’écriture de certains personnages (comme le prêtre sbirifié) viennent néanmoins contrebalancer un peu la chose. Hélas, on est déjà à la fin des sixties, la Hammer commence à manquer d’inspiration et avec la sortie de Rosemary’s Baby et La Nuit des Morts Vivants aux USA, le public va vite avoir envie de films d’épouvante plus modernes et réalistes…

Note: Curiosité

https://www.imdb.com/fr/title/tt0062909/

Alien: Covenant: Terminons notre rétrospective Alien (on se réservera l’opus originel pour le cycle Lovecraft, les amis) avec l’infâme Covenant, suite directe de Prometheus, qui cette fois ci revient dans l’univers d’Alien tout en continuant ses questionnements créationnistes… puisque Ridley Scott est encore à la barre (et je pense qu’on peut dire que c’est déjà le début de la fin du Monsieur quand on voit la suite de sa filmo).

Vous vous rappellez quand je disais que Prometheus semblait émaner d’un Ridley Scott le cul entre deux chaises? Hé bien cette fois ci, les fans ont gueulé tellement fort qu’il a décidé d’intégrer des xénomorphes dans cette suite mais en continuant encore plus fort ses délires mystico-religieux (comme les nombreuses références à la Bible) avec un scénario encore plus au rabais! Vous vous rappellez des personnages tellement mal écrits et cons de Prometheus qu’il fallait avoir le script sous les yeux pour comprendre leur rôle dans la mission? De la logique incompréhensible dans la gestation des monstres? De la mégalomanie croissante de David? Hé bien prenez tous ces ingrédients, mettez les potards à fond et vous obtiendrez ce Covenant… qui réussit même le pari de contredire son aîné, pourtant réalisé par le même gus. Oui, oui! Si ce métrage était un troll, ça serait du génie! Alors oui, on pourrait toujours parler de sa photographie splendide (que l’on soit dans l’espace, la nature ou les ruines des Ingénieurs), de ses thématiques intéressantes (mais toujours peu subtiles devant la caméra de Scott) qui tentent de renouveller l’univers, du personnage de David (le grand méchant du métrage même si ce n’est jamais totalement assumé) et de son cynisme, de ses expériences gigeriennes (merci les scènes coupées), de la gestion du rythme et… c’est à peu près tout! Même la fin est téléphonée et la présence des xénomorphes paraît complètement factice (même si les néomorphes n’ont pas grand chose de convaincant) au vu de leur faible présence à l’écran!

Ayant vu le film à sa sortie en salles, je n’arrivais pas à le relier ni à la saga ni à Prometheus… je comprends mieux pourquoi aujourd’hui! Ce métrage est un véritable catalogue d’incohérences facilités scénaristiques et scientifiques ponctuées de quelques hommages lourdingues aux autres opus! Encore une fois, seul Fassbender s’en sort bien mais comme c’est le seul acteur connu (à l’exception d’un caméo de Pearce et de Franco) et omniprésent du film… Si l’on doit chercher une filiation à Covenant, elle a plutôt du côté de Blade Runner (il est d’ailleurs marrant de se dire que les seuls chefs d’oeuvre de Ridley Scott soient écrites par d’autres) sauf que… c’est hors sujet pour un film se rattachant à la saga. Il serait d’ailleurs à peine exagéré que de voir le réalisateur projetter ses névroses sur l’androïde: l’un méprise la saga et son public (un grand merci à la Fox de lui avoir donné quartier libre d’ailleurs) pendant que l’autre se prend pour Dieu, décimant humains et Ingénieurs sans le moindre remords (et surtout sans raison), façon Chute de Rome. Et il n’y a qu’à voir ses derniers films pour constater que clairement, Monsieur Scott se moque de tout, y compris du réalisme historique. Côté suspense, le film n’a pas grand chose d’horrifique puisque les tensions sont trop vite désamorcées (de toute façon, on se fout autant des personnages secondaires que de l’héroïne principale). La véritable question à vous poser est la suivante: avez vous réellement envie de subir un métrage de deux heures qui vous apprend qu’un androïde complexé a créé une des créatures les plus terrifiantes du cinéma d’horreur/SF simplement par ce qu’il en avait le pouvoir (oui, la même que l’on voit pourtant dans une sculpture du film précédent mais… passons)? Souhaitez vous assister à un métrage encore moins digeste que Prometheus qui ne répondra à aucune de vos réponses? Moi… non! Dire qu’on a annulé le Alien 5 de Neill Blomkamp (pourtant je suis loin d’être fan de son univers) pour ça… La seule bonne nouvelle est que l’échec du film a fait annuler le projet d’un troisième film par Ridley Scott himself! Ouf!

Bref, vous l’avez compris, il n’y a pas grand chose à sauver de ce film qui enterre à la fois la saga Alien et les rares spectateurs qui auront vu le génie de Prometheus! Et c’est comme ça que Covenant se paye le luxe de se placer entre Aliens (opus dispensable et pourtant oh combien meilleur que ce Covenant) et Alien Romulus, soit parmi les pires films de la franchise, c’est fort!

Note: Dispensable

https://www.imdb.com/fr/title/tt2316204/

Quand à ceux qui se demanderaient mon classement personnel, le voici, même si je ne tiens réellement en estime que les deux premiers films:

  1. Alien, le huitième passager (1979)
  2. Alien3 (1992)
  3. Prometheus (2012)
  4. Alien la Résurrection (1997)
  5. Aliens, le retour (1986)
  6. Alien: Covenant (2017)
  7. Alien: Romulus (2024)

En espérant que ces revisionnages vous auront plu autant qu’à moi!

L’Envers du Culte: La Nuit du Loup-Garou (1961), Prometheus (2012)

La Nuit du Loup-Garou: Seul film de la Hammer sur la thématique des lycanthropes, La Nuit du Loup-Garou s’avère être une jolie fresque moyenâgeuse et originale sur le sujet, sublimée par de jolis décors et un suspense progressif (on ne voit la créature qu’à la fin du métrage). On retrouve ici Oliver Reed dans un de ses premiers grands rôles… et il faut bien reconnaître le bougre s’en sort très bien dans ce rôle tourmenté! Si le film a subi les outrages du temps (on est plus proche ici de The Wolf Man que du Loup-Garou de Londres… pour le dire élégamment), on appréciera la métaphore sociale de cette tragédie et la volonté de mettre au premier plan/humaniser la victime de cette malédiction (une « cause » de lycanthropies bien plus ancienne que les morsures de loup) qui ici est pleinement consciente de ses méfaits. On déplorera par contre une romance peu crédible… Ceci dit ce film de Fisher figure facilement parmi les chefs d’oeuvre de la Hammer alors ne boudons pas notre plaisir…

Note: Solide

https://www.imdb.com/fr/title/tt0054777/

Anecdotes:

  1. Le film sera un échec lors de sa sortie, ce qui explique l’absence de saga consacrée à ce monstre sacré du cinéma d’épouvante dans le catalogue de la Hammer!
  2. Ce métrage réutilise des décors du Cauchemar de Dracula et d’un autre métrage avorté de la Hammer: « The Rape of Sabena » (sur le thème de… l’Inquisition espagnole). Ces anglais ne perdent décidemment jamais le nord!
  3. Ce film est également adapté de la nouvelle Le Loup-Garou de Paris de Guy Endore.

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Prometheus: Impossible de comprendre pourquoi ce cinquième film de la franchise (septième si on inclue les deux films Alien vs Predator) divise autant sans se pencher sur sa génèse et le retour derrière la caméra du réalisateur Ridley Scott, responsable de l’indépassable premier opus! En effet, depuis Alien3, celui ci souhaitait faire un film sur l’origine des xénomorphes. En 2009, la Fox envisage sérieusement une préquelle à Alien et son choix se porte vite vers le réalisateur brittanique. En 2011, ce dernier annonce un métrage épique qui se pencherait sur l’histoire des Ingénieurs (le space jockey aperçu dans le premier Alien), leurs liens avec les créatures et l’espèce humaine mais à la fois très différent des films Alien. Alors a t il tenu ses promesses?

Et bien mmh… pas vraiment mais on y reviendra! Bien plus SF qu’horreur, il faut bien avouer que Prometheus est splendide, de ses décors à ses effets spéciaux (au hasard, les Ingénieurs). Malheureusement, ce n’est pas le cas du scénario qui semble avoir grandement souffert des réécritures successives ou du complexe de grandeur de son réalisateur… Peut être aussi que ses propres enjeux étaient trop lourds à porter pour un seul métrage! Une des grandes faiblesses du film, au delà des incohérences absolues suscitées par les incubations (aléatoires) des créatures et des temporalités qui s’entrechoquent mal (la technologie du Prometheus plus avancée que celle du Nostromo alors que le film se passe 30 ans avant en est un superbe exemple), est qu’il ne clarifie jamais vraiment son rôle entre préquelle mal branlée, remake déguisé et spin-off mal assumé (au delà des déclarations de Scott et des scénaristes). Il aurait pourtant tout à gagner à être totalement indépendant de l’univers Alien, malgré la présence des ingénieurs et d’autres créatures gigeriennes dont le rôle et l’origine sont évoquées mais de façon toujours très floue (comment a été créée l’huile noire? pourquoi les Ingénieurs veulent détruire la Terre? pourquoi ont ils créé l’espèce humaine et pourquoi nous ont ils laissé un moyen de rentrer en contact avec eux? Beaucoup de questions, aucune réponse). Cela donne l’impression que Scott ne peut pas s’empêcher d’alterner mépris pour les autres opus et fan service obligatoire… Les autres défauts majeurs sont le manque de personnages intéressants/forts (j’aime bien Rapace mais elle n’est clairement à la hauteur pour succéder à Weaver) et son rythme inconstant. Disons le clairement, seul le personnage de l’androïde David (excellent Michael Fassbender, tout en ambiguités) mérite un certain intérêt ici (ce qui sera bien problématique dans sa suite, Covenant) malgré le casting conséquent (Elba, Theron, Pierce). Dommage pour un équipage de choc censé trouver la réponse sur l’origine de l’homme… Le suspense est néanmoins correctement maintenu jusqu’à une fin haletante et grâce à un univers crédible où de nouvelles références/thématiques religieuses/métaphysiques apparaissant en filigrane. On ne peut pas reprocher au métrage de ne pas essayer d’enrichir la mythologie (comme le personnage de Peter Weyland et sa recherche de vie éternelle, par exemple). Mais le mal est fait…

Bien que la majorité des fans de la saga attendaient autre chose au moment de sa sortie (et moi avec), Prometheus « réussit » le pari fou de proposer une préquelle alternative et fascinante, qui certes rajoute plus de questions qu’elle n’en résout mais qui s’impose sans mal sur le podium des plus jolis films de la franchise (c’est dire s’il y a peu à se mettre sous la dent)… malgré un côté salement foutraque (par exemple, j’ai dû revoir les vidéos de ce bon vieux Durendal pour en comprendre les multiples clins d’oeil râtés aux autres opus) !

Note: Curiosité

https://www.imdb.com/fr/title/tt1446714/

Anecdotes:

  1. Le choix du nom du film (et du vaisseau) est évidemment un clin d’oeil au mythe de Prométhée, qui présente une thématique très proche.
  2. Les scènes extérieures ont été filmées en Islande (Hekla Valley, Dettifos Falls) et en Ecosse (The Storr, Fort William).
  3. Il s’agit d’un des derniers travaux du regretté H. R. Giger (il réalisera quelques parties de décors et son influence artistique sur le film sera visiblement supérieure à celle dans Alien) qui décèdera deux après la sortie du métrage.
  4. Le scénario serait inspiré des travaux de Erich von Däniken sur la théorie des anciens astronautes.
  5. Si Meredith Vickers (Charlize Theron) semble particulièrement froide et distante tout au long du film, c’est parce que son personnage était un androïde dans les anciens scripts.